Je danse, elle danse, nous dansons : une dimension agentive caractérise l’action de danser. Dans la danse des caboclinhos (Pernambuco, Brésil), nous sommes invités à réfléchir sur qui danse et sur qui est dansé, lors de cette performance. Les caboclinhos sont des associations de carnaval composées d’hommes, de femmes et d’enfants déguisés en Amérindiens et armés d’arcs et de flèches, défilant dans les quartiers périphériques des villes de la région du Pernambuco. Leurs danses, appelées littéralement des « manœuvres », évoquent des mouvements de guerre. Au-delà des forces mobilisées pour déterminer qui danse le plus et le mieux, se joue aussi une bataille dans le domaine spirituel. Les caboclinhos sont reliés à la Jurema, une religion afro-indigène qui rend un culte aux caboclos (esprits d’ancêtres indigènes, guerriers et guérisseurs). La compréhension du « monde comme un combat » dans l’esthétique du Nordeste du Brésil, est une catégorie centrale pour penser l’ethos de cette région (Lagrou et Gonçalves, 2013). Il est donc nécessaire de mettre en lumière la dimension agonistique de cette pratique afin d’appréhender cette danse comme une expérience corporelle traversée par des forces d’opposition.